GIEC : UN RAPPORT BRULANT QUI FAIT FROID DANS LE DOS

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Dans un prĂ©cĂ©dent article, nous nous interrogions sur la rĂ©alitĂ© du rĂ©chauffement climatique et surtout sur son origine liĂ©e Ă  l’activitĂ© humaine, due essentiellement aux Ă©missions de gaz Ă  effet de serre, dont principalement le gaz carbonique (CO2).

Nous allons maintenant nous intĂ©resser au rapport publiĂ© le 8 octobre 2018 par le GIEC (Groupe Intergouvernemental d’Experts  sur l’Évolution du Climat).

Le seul « rĂ©sumĂ© Ă  l’intention des dĂ©cideurs » reprĂ©sente 33 pages plutĂŽt denses et il n’est actuellement disponible qu’en anglais. Une synthĂšse en français de 5 pages figure dans le communiquĂ© de presse.

De nombreux mĂ©dias se sont nĂ©anmoins fait l’écho de ce rapport. Nous citerons en particulier :

Nous allons Ă  notre tour tenter de le faire.

1 – CONFIRMATION DU RECHAUFFEMENT DU SYSTEME CLIMATIQUE

Le rapport confirme que le rĂ©chauffement climatique est une rĂ©alité ; il est aujourd’hui Ă©valuĂ© Ă  +1° C par rapport Ă  l’ùre prĂ©-industrielle (RĂ©fĂ©rence : 1850)

Ce rĂ©chauffement a des consĂ©quences rĂ©elles et mesurables dĂšs aujourd’hui et Ie rapport fait le lien avec certains phĂ©nomĂšnes mĂ©tĂ©orologiques ou naturels : l’augmentation de la frĂ©quence des tempĂȘtes et cyclones, la modification du rĂ©gime des pluies ou encore la baisse des rendements agricoles notamment liĂ©e Ă  la sĂ©cheresse.

Au rythme des Ă©missions actuelles, il atteindrait 1,5 Â°C entre 2030 et 2052 et 3 Â°C d’ici 2100.

Il ne s’agit bien sĂ»r que d’une moyenne, qui dissimule une forte hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© : voir par exemple cette animation (crĂ©dit : wikimedia) qui couvre la pĂ©riode 1880-2017 (voir le dĂ©filement du temps en haut et Ă  droite).

La gravitĂ© des impacts dus au rĂ©chauffement climatique augmente plus rapidement que les tempĂ©ratures : au-delĂ  de certains seuils, une augmentation mĂȘme minime des tempĂ©ratures peut donc avoir des effets extrĂȘmement forts. De plus, les diffĂ©rents phĂ©nomĂšnes sont en interaction, ce qui pourrait encore aggraver les situations envisagĂ©es par les prĂ©dictions climatiques.

Le GIEC a alors examinĂ© deux hypothĂšses Ă  l’horizon 2100 : +1,5 °C et +2 °C. C’est Ă©videmment la premiĂšre qui est l’objectif recommandĂ©.

2 – CONSÉQUENCES D’UN RÉCHAUFFEMENT LIMITÉ A 1,5 °C

À 1,5 °C de rĂ©chauffement, les consĂ©quences seraient les suivantes :

    • Fonte des glaces et hausse du niveau de la mer.
    • ÉlĂ©vation des tempĂ©ratures terrestres et augmentation de la frĂ©quence et de l’intensitĂ© des canicules (en particulier en AmĂ©rique du Nord, en Europe du Sud, en Asie centrale et occidentale ainsi que dans les rĂ©gions tropicales).
    • Multiplication des Ă©vĂ©nements mĂ©tĂ©orologiques extrĂȘmes (tempĂȘtes, cyclones, sĂ©cheresse, mais aussi incendies, glissements de terrain).
    • Diminution de la quantitĂ© et de la qualitĂ© des ressources en eau
    • DĂ©soxygĂ©nation et acidification des ocĂ©ans, rĂ©sultant en une diminution de la biodiversitĂ© marine (donc des ressources de la pĂȘche).
    • Changements importants dans la rĂ©partition des prĂ©cipitations (sĂ©cheresses Ă  certains endroits, inondations Ă  d’autres).
    • Destruction de certains Ă©cosystĂšmes (rĂ©gions humides, Ă©cosystĂšmes cĂŽtiers, Ă©cosystĂšmes mĂ©diterranĂ©ens, forĂȘts borĂ©ales
).
    • RĂ©duction de la biodiversitĂ© : jusqu’à 6 % des insectes, 8 % des plantes et 4 % des vertĂ©brĂ©s verraient leur habitat devenir majoritairement invivable Ă  cause du rĂ©chauffement climatique.
    • Diminution de la productivitĂ© agricole, en particulier pour les productions cĂ©rĂ©aliĂšres, mais aussi vĂ©gĂ©tales.

3 – CONSÉQUENCES D’UN RÉCHAUFFEMENT DE 2 °C

À 2 °C de rĂ©chauffement, tous les phĂ©nomĂšnes dĂ©crits pour un rĂ©chauffement de 1,5 °C seraient exacerbĂ©s :

    • Jusqu’à 13 % des terres mondiales pourraient se transformer radicalement (dĂ©sertification notamment).
    • Le niveau de la mer Ă  l’échelle de la planĂšte serait supĂ©rieur de 10 cm Ă  celui qui risquerait d’ĂȘtre enregistrĂ© s’il Ă©tait limitĂ© Ă  1,5 °C.
    • La probabilitĂ© que l’ocĂ©an arctique soit libre de glace en Ă©tĂ© serait d’au moins une fois tous les dix ans (au lieu d’une fois par siĂšcle).
    • La rĂ©duction de la biodiversitĂ© serait multipliĂ©e par deux.
    • La quasi-totalitĂ© des rĂ©cifs coralliens (> 99 %) serait anĂ©antie.

Bien entendu, la désertification et la montée des eaux risquent de créer des situations dramatiques et des migrations de réfugiés climatiques qui seront difficiles à gérer.

4 – QUELLES MESURES FAUT-IL PRENDRE ?

Le GIEC donne des pistes pour limiter nos Ă©missions, notamment dans le quatriĂšme chapitre du rapport. Voici les principaux en termes d’impact :

    • La transition Ă©nergĂ©tique : le remplacement des Ă©nergies fossiles par l’électricitĂ© adossĂ© au dĂ©ploiement d’énergies Ă  faible intensitĂ© carbone (nuclĂ©aire, solaire, Ă©olien
) serait une des maniĂšres les plus efficaces de rĂ©duire nos Ă©missions de CO2.
    • La transition agricole : l’agriculture Ă©tant l’un des gros contributeurs aux Ă©missions de CO2, le GIEC propose des façons de rĂ©duire son impact par la rĂ©duction du gaspillage alimentaire, l’agroforesterie et la limitation de la dĂ©forestation, mais aussi par la transformation du systĂšme agricole et alimentaire.

Mais le terme de transition est trompeur ; en fait, il faudrait changer radicalement nos modes de vie en ville et nos modes de production alimentaire :

    • RĂ©duire drastiquement nos besoins en Ă©nergie, limiter les consommations les moins utiles, changer notre façon de construire pour penser des logements plus petits, plus efficients, des habitats plus denses, ne plus voir la voiture comme un mode de transport prĂ©pondĂ©rant.
    • Sortir de la monoculture, rĂ©duire la part de l’élevage et mieux l’intĂ©grer aux cultures, rĂ©duire le gaspillage et la surconsommation.

Une autre solution envisagĂ©e pour rĂ©duire le rĂ©chauffement climatique, Ă  laquelle il faudra peut-ĂȘtre recourir, consiste Ă  mettre en Ɠuvre des technologies d’émissions nĂ©gatives, pour retirer du CO2 de l’atmosphĂšre. Il existe deux types de technologies :

    • Les procĂ©dĂ©s naturels (arbres, sols, puits naturels de carbone dans l’ocĂ©an
)
    • Les procĂ©dĂ©s chimiques pour capturer le CO2 directement dans l’atmosphĂšre et le stocker (en sous-sol, par exemple).

Ces technologies sont coĂ»teuses et potentiellement dangereuses pour l’environnement. La plupart n’ont pas encore Ă©tĂ© testĂ©es Ă  grande Ă©chelle et certains accusent le GIEC d’entretenir des illusions : voir par exemple cet article sur le site bastamag.net (cliquez sur l’image ci-dessous) :

4 – CONCLUSION

Nous avons tout au plus quelques annĂ©es pour rĂ©duire durablement nos Ă©missions de CO2. Or ce n’est pas vraiment la tendance : depuis 1945, les Ă©missions mondiales n’ont jamais diminuĂ©, sauf pendant les crises Ă©conomiques. Depuis le Protocole de Kyoto, les 30 derniĂšres annĂ©es de lutte contre le rĂ©chauffement climatique n’ont mĂȘme pas permis d’inverser la courbe des Ă©missions
 On est donc assez mal parti pour inverser rĂ©ellement la tendance.

Pour Ă©viter de dĂ©passer les 1,5 Â°C, il faudrait des transitions rapides et de grande envergure dans les domaines de l’amĂ©nagement du territoire, de l’énergie, de l’industrie, du bĂątiment, du transport et de l’urbanisme.

On parle ici de vraies révolutions, qui nécessiteraient de repenser entiÚrement nos modÚles énergétiques, urbains, ou agricoles

Bien que ce rapport dresse un bilan inquiĂ©tant de l’avenir, il est nĂ©anmoins optimiste, dans le sens oĂč il nous laisse un espoir de redresser la situation. C’est en ce sens que certains pensent qu’il n’est pas assez alarmiste pour dĂ©clencher une puissante rĂ©action.

Nous reviendrons donc bientĂŽt sur une approche, dite thĂ©orie de l’effondrement ou « collapsologie ». Elle considĂšre que nos sociĂ©tĂ©s actuelles sont probablement condamnĂ©es sous leur forme actuelle (comme ont disparu les civilisations mayas ou romaines) et que des changements de mode de vie nous seront imposĂ©s de fait dans le siĂšcle prĂ©sent parce que nous n’avons pas rĂ©agi suffisamment tĂŽt.

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